Blood
Diamond
(Le diamant de sang)
Un film qui se prétend moral. Moralisateur, un peu, mais surtout
moral. Les diamants sales, c'est mal, et il ne faudrait pas en
acheter.
Edward Zwick est un faiseur de
films «à messages» comme Hollywood les affectionne. Sur
n’importe quel sujet, le monsieur peut emballer une œuvre plus
ou moins épique, avec une qualité d’exécution propre, que
certains qualifieront d’honnête. De la Guerre de Sécession, avec
son opus le plus réussi qu’est Glory, au choc des cultures, avec
le pavé indigeste du Dernier samouraï, Zwick bâtit des machines
à Oscars et des véhicules luxueux pour accompagner ses stars
vers les récompenses multiples.
Rebelote avec ce Blood diamond dont
le thème (le chaos africain et son exploitation par les
occidentaux) fera immédiatement penser au Lord of war de Andrew
Niccol. Si ce dernier possédait déjà quelques travers, en
particulier concernant la « punition » du vilain vendeur d’armes
incarné par Nicolas Cage, il apparaît d’autant plus audacieux et
percutant à la vision du traitement paresseux choisi par Zwick.
Certes, pendant les deux tiers de Blood diamond, le spectateur
est parfois séduit, le sujet étant forcément inattaquable et
quelques scènes de fusillade demeurant impressionnantes (quoi
que bien minuscules face à celles du récent Les Fils de
l’homme). Mais déjà une certaine gêne nous envahit. Le
réalisateur a beau forcer le trait de la sincérité, le
paternalisme transparaît déjà.
La clef de l’œuvre se lit alors
dans le regard de la déplaisante journaliste incarnée sans éclat
par une Jennifer Connelly qu’on a connue largement plus
inspirée. Tout cela tient sur du papier glacé, en une
exploitation de la misère qui se dissimule derrière les
meilleures intentions. Zwick clame qu’on a le droit de faire du
divertissement pour mieux faire passer les messages importants.
Il n’empêche que lorsque Blood diamond se transforme en un «buddy
movie» à la sauce guimauve, on tique. On s’attend presque à
entendre Di Caprio et Connelly sortir certaines répliques
condescendantes d’un OSS 117. Dans son dernier quart d’heure, le
film s’égare totalement sur le chemin du mélodrame le plus
prévisible, en particulier à cause du jeu appuyé de Di Caprio
(finalement bien meilleur dans les Infiltrés) et les images
clinquantes de Zwick, à mi-chemin entre documentaire touristique
et symbolique naïve.
On oublie alors toute la misère des
enfants soldats (thème que Zwick ne cesse d’édulcorer, sans
jamais oser aller jusqu’au bout) pour s’attendrir sur la
Rédemption du gentil Léonardo. Tant de niaiserie et d’angélisme
béat finissent par totalement balayer la puissance approchée
dans les prémisses de Blood diamond. On reconnaîtra la
performance de Djimon Hounsou, véritable héros du film,
malheureusement relégué à l’état de «sidekick» dès la fin de la
première heure. Ce choix scénaristique représente l’échec de
l’œuvre dans son ensemble, qui passe d’un point de vue africain
à un regard purement occidental, alors que c’est bien la
démarche inverse qu’il aurait sans doute fallu adopter.