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Rugby (Mondial-2007)
La Coupe du monde, un moteur
14 Août 2007

Longtemps cramponnés à certains principes rigoristes, les dirigeants de l’International Board (IRB) ont attendu 1987 pour offrir une Coupe du monde au rugby ; une compétition qui, avec l’avènement du professionnalisme huit ans plus tard, a contribué à l’expansion de ce sport.

Le football ? 1930. Le handball ? 1938. Le volley-ball ? 1949. Le  basket-ball ? 1950. Les Mondiaux rythment la cadence des principaux sports collectifs depuis plus d’un demi-siècle. Le rugby, qui revendique une seule apparition officielle aux jeux Olympiques en 1924 à Paris, a attendu la fin des  années 1980 pour se doter enfin d’un rassemblement planétaire.
Jusque-là, le Tournoi des cinq nations, compétition amicale dont la première édition remonte à 1910, permettait de régler les questions de hiérarchie en Europe, confrontée périodiquement aux principales nations de  l’hémisphère sud (Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud, Australie) lors de tournées estivales ou automnales.
Ainsi parlait-on des «Invincibles» All Blacks de Nepia, invaincus lors de leur périple en Europe en 1925, ou des Français de Lucien Mias, auteurs d’une tournée héroïque en Afrique du Sud en 1958. Mais toujours pas de référence à un titre mondial. Les dirigeants de l’International Board, qui consentirent à intégrer la France à leurs discussions en 1978, semblaient réticents à céder une partie de leur pouvoir.
L’idée d’organiser une Coupe du monde fut d’abord poussée par un  journaliste australien, David Lord, en 1983. Trop tôt ! Les caciques n’étaient pas prêts à la révolution culturelle.
Mais deux hommes d’affaires néo-zélandais, Dick Littlejohn et Tom Johnson, et un ancien international australien, Nicolas Shehadie, ancien maire de Sydney et propriétaire d’une chaîne de télévision, saisirent le concept, et frappèrent aux bonnes portes. Ils reçurent l’aval d’Albert Ferrasse, président de la Fédération française (FFR) et de Danie Craven, son ami-homologue sud-africain.
   
Budget multiplié par 40
Ainsi parrainé, le projet fut adopté à l’unanimité lors d’un Conseil de  l’IRB qui, en avril 1985 à Paris, confia l’organisation de la première Coupe du monde conjointement à l’Australie et la Nouvelle-Zélande.
Il fut décidé que seize équipes participeraient à cette édition inaugurale : les huit nations membres de l’IRB (Ecosse, pays de Galles, Irlande, Angleterre,  Nouvelle-Zélande, Australie, Afrique du Sud, France) auxquelles s’ajouteraient huit pays invités. Mais la question de la participation de l’Afrique du Sud, alors boycottée pour cause d’apartheid, se posa rapidement. Et Danie Craven annonça lui-même le forfait des Springboks en 1986. Les Sud-Africains attendront 1995 pour participer au Mondial.
Disputée sur des stades champêtres, cette première édition connut un vif succès, notamment sur le plan sportif, avec une demi-finale de légende, remportée par la France aux dépens de l’Australie (30-24), qui précéda le  triomphe des All Blacks sur les Français (29-9) en finale.
A l’époque, le rugby, officiellement amateur, s’ouvrait aux contingences de l’argent. Et les organisateurs peinèrent pour équilibrer un budget de 5,34 M EUR. Vingt ans plus tard, en 2007, le comité d’organisation français (GIP  France 2007) s’appuie sur un budget multiplié par... 40 (218 M EUR).
Entretemps, l’International Board a pris pleinement conscience des  retombées potentielles de la Coupe du monde. Avant même la deuxième édition, organisée conjointement par l’Angleterre et la France en 1991, l’IRB s’est dotée de deux sociétés : Rugby World Cup (RWC), chargée d’organiser le Mondial et ses relations publiques, basée dans un paradis fiscal (l’Ile de Man). Et Rugby World Cup BV qui prend en charge tous les aspects commerciaux. Mêlant rapidement succès sportif et réussite économique dès 1991, la Coupe du monde ajouta une fragrance humaine à sa palette, en 1995, en Afrique du Sud.  La victoire des Springboks, autrefois symboles du régime de l’apartheid, contribua à la construction de la nation «arc-en-ciel», portée par le président Nelson  Mandela qui, vêtu du célèbre maillot vert-bouteille, remit le trophée au capitaine François Pienaar.
   
Une manne appétissante
Mais au-delà du succès des Springboks, le rugby amorça un virage décisif pendant cette troisième Coupe du monde, au cours de laquelle des émissaires du milliardaire australien des médias Kerry Paker, désireux de mettre en place un circuit professionnel, démarchèrent les joueurs. Ebranlé, l’International Board choisit finalement d’accompagner le mouvement, entérinant le passage au professionnalisme le 26 août 1995 à Paris, deux mois à peine après la victoire des Springboks sur les All Blacks en finale à Johannesburg.
Entre Coupe du monde et avènement du professionnalisme, un homme assura la transition : l’ailier des All Blacks Jonah Lomu, grande vedette du Mondial-95,  auteur de 4 essais en demi-finale face à l’Angleterre, et future tête de gondole des compétitions dans l’hémisphère sud (Super 12 et Tri-nations).
Quatre ans plus tard, en 1999, en Angleterre et au pays de Galles, Jonah Lomu était toujours là. Mais les All Blacks furent éliminés par la France lors d’une demi-finale d’anthologie. Une semaine plus tard, le capitaine australien  John Eales brandit la Coupe William Webb Ellis, permettant aux Wallabies d’établir un «record» des victoires en Coupe du monde (2).
Désormais enracinée dans la «culture rugby», au point de phagocyter les autres compétitions, la Coupe du monde, synonyme de retombées financières  importantes, a aiguisé les appétits et attisé les différends. 
Qu’importe si le rugby concerne un nombre restreint de nations à travers le monde ! Les désignations, autrefois effectuées à main levée, sont désormais précédées de longues et coûteuses campagnes de communication, comme lorsqu’il fallut départager la France et l’Angleterre candidates pour le Mondial-2007.
Et puis, il y eut l’épisode 2003. Les Australiens, qui devaient partager l’accueil de la compétition avec la Nouvelle-Zélande, ont finalement organisé l’événement seuls, après que l’IRB, eut constaté que les Néo-Zélandais ne  pourraient présenter des stades vierges de publicité. L’International Board, qui perçoit les droits de télévision et de  marketing, a finalement retiré 97,4 M EUR de bénéfices de ce cinquième mondial !
La Nouvelle-Zélande (4 millions d’habitants) aura l’occasion de se  rattraper en 2011, puisque l’île au long nuage blanc a été préférée au Japon pour recevoir la septième Coupe du monde. L’occasion de vraiment mesurer le  chemin parcouru depuis 1987.


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