En France, l’inquiétude des musulmans ne fait que croître. Déjà fortement pointée du doigt de manière sournoise et subissant des attaques parfois directes, les considérant comme le principal danger auquel fait face la France, la communauté musulmane a encore de quoi craindre le pire dans un proche avenir.
La publication toute récente d’un rapport sur la confrérie des Frères musulmans dans l’hexagone a de quoi, en effet, justifier les nombreuses appréhensions de millions de musulmans qui vivent en France. «Frères musulmans et islamisme en France», tel est l’intitulé de ce rapport rédigé par deux hauts fonctionnaires qui, de prime abord, concerne les activités en France d’une tendance islamiste, mais nombreux sont ceux qui ont d’ores et déjà critiqué vertement ce rapport, estimant qu’il ne fait que renforcer l’amalgame envers la communauté musulmane déjà cible de la recrudescence de l’islamophobie.
Les rédacteurs mettent en avant « L’entrisme » des frères musulmans et évoque directement la menace qui pèse sur la « cohésion de la société française ». Selon ce rapport controversée et rejeté par la communauté musulmane, les frères musulmans font preuve d’entrisme dans trois secteurs particulièrement, à savoir l’éducation nationale, l’enseignement supérieur et le sport. Rédigé en moins d’une centaine de pages et ne contenant franchement que quelques généralités, le document a provoqué un véritable branlebas de combat puisque, sous la présidence du président francais Emmanuel Macron, s’est tenu un Conseil de défense en présence du Premier ministre et de quelques ministres importants du gouvernement.
Dans les milieux de la droite et de l’extrême-droite, ce rapport, comme un pain béni, tombe à point nommé pour renforcer la croisade contre ce qu’il appelle la menace du « grand remplacement », ce qui n’est pas le cas au sein d’autres protagonistes qui l’ont critiqué en mettant en garde contre la stigmatisation des musulmans. De l’autre côté, la Fédération des musulmans de France, présentée dans le rapport comme la branche française des Frères musulmans, dénonce des «accusations infondées», elle met en garde contre des «amalgames dangereux» entre islam et radicalité islamiste.
Un rapport critiqué également par le chercheur Vincent Geisser, directeur de l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans d’Aix-en-Provence. Vincent Geisser y voit une démarche politique portée notamment par l’actuel ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Il insiste sur la volonté « intégrationniste » des Musulmans de France. La Grande mosquée de Paris vient, elle aussi, de monter au créneau pour dénoncer le rapport.
« Ce rapport n’est pas un outil de sécurité. C’est une arme rhétorique, maniée contre une partie du peuple français, celle-là même que l’on voudrait faire taire derrière un rideau de mots techniques et de tableaux flous », a, en effet, écrit le Recteur de la Grande mosquée de Paris dans sa réaction sur le site de l’institution. Chems-Eddine Hafiz a ajouté : « Sous les habits feutrés d’un document administratif, c’est une rhétorique d’exception qui se déploie.
Derrière la prétention à la rigueur, c’est un climat délétère que l’on entretient : celui de la peur, du soupçon, de la stigmatisation. On y traque non pas des actes, mais des intentions ; non pas des délits, mais des appartenances supposées ; non pas des projets criminels, mais des présences trop visibles, trop pieuses, trop musulmanes ». k.H.