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Edition du 6 Fevrier 2014



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L’écume du temps, recueil de poésie de Mohamed Abdoun
L’espoir "désespéré"d’un "fou sage à lier"
6 Fevrier 2014

« J’aurai voulu un songe pur/ dans ces dédales trops obscurs/ je n’ai surpris que le mentir/ ». « Un grand désespéré qui insuffle l’espoir/ Pardon pardon que de vivre ailleurs que dans vos foires/ ô grand désespéré raconte-nous l’espoir »

Après un premier roman, le Crépuscule humain, écrit dans un style un tantinet déroutant, tout comme, d’ailleurs, la personnalité de son auteur, un premier recueil de poésie, la Symphonie inachevée, le journaliste, romancier et surtout poète, Mohamed Abdoun, nous offre, cette fois-ci, un nouveau recueil poétique à la fois très sombre, mais ô combien plein
d’espoir : L’écume du temps.

Force est de dire qu’il n’a pas choisi la facilité — commerciale s’entend — sachant que l’école-Benbouzid a tué en beaucoup d’entre nous la moindre velleité de poésie. Aussi, comment pouvoir conserver l’amour de la poésie, pourtant indispensable à la vie, quand on fait face à la hideur du quotidien ? Ce recueil est une ode à la vie en ce siècle où les tueries se disputent aux catastrophes naturelles — soubresauts d’une terre violentée par ses enfants — et où les seules déclamations se font à la gloire de "X" et partant, de ce qui fait courir tout un chacun, l’argent et les honneurs éphémères.

Nous n’avons nullement, là, la prétention d’analyser ou de décortiquer ces magnifiques strophes. On se laisse juste bercer par la musique des mots et on suit, pas à pas, le labyrinthe de l’âme tourmentée du poète qui rêve d’un monde idéal qui ne serait plus régi par le tout-puissant DOLLAR.
« Les dieux se cachant hors du monde
La femme-objet par trop immonde
L’amour empochant ces tôlards
L’amour qui rime avec dollars
Les cris inhumains qui se heurtent
Au fou clapotis d’une meute
D’hommes de femmes et de chiens

C’est la chasse ouverte au bien ». Ces vers sont nés de la plume d’un digne héritier d’Appolinaire, de Vigny et surtout d’Aragon. Il a eu pour père spirituel, comme il le dit lui-même, l’éternel Jean Ferrat dont la mort, en mars 2010, avait été une véritable douleur pour lui. Il avait écrit un hommage poignant en cette triste occasion :

« Ma pire hantise vient de se produire, mon guide, mon père spirituel est décédé, je le connais sans l’avoir directement rencontré. Rafik Bakhtini, qui a grandi avec ses mélodies, ses chants, ses coups de gueule, peut en parler longuement, Ali Oussi, lui, s’en fout, Wassim Benrabah, lui, est une sorte de compilation des deux. Mais tous, oui tous, ont repris le flambeau depuis longtemps, tous savent, au moins, que les artistes sont les prophètes de leurs temps, que la bonté et la beauté doivent prévaloir sur tout autre chose (...) ».

Kamel Zaidi n’avait pas encore rejoint l’homme pluriel obligé d’endosser des personnalités diverses pour ne pas céder à la folie. Lui « le fou sage à lier ». Oui, Mohamed Abdoun, cet écorché vif, a bel et bien repris le flambeau pour perpétrer la dure mission du poète, celle de dire la beauté, de voir des roses là où
il y a la fange, de chanter l’amour, l’enfant, la femme... « Au début était la femme/Elle sera toujours là/Quand la lumière s’éteindra ».

Il veut continuer à rêver d’un monde où la femme redeviendrait la mère, la sœur, l’amante et non la réprouvée à l’origine du... mal, recréer un monde où l’enfant retrouvera son innocence volée.

« Des squales rodent dessus l’enfant endormi dans les bras des Chimères
Hélas ne puis pleurer dans l’onde trop amère »
« Je console l’enfant pour qui l’aurore est fiel »

Il continue d’égrainer les mots chantants, même dans sa descente aux
abysses : « Je descend encor je descend/Cerbère me salue et le Styx m’engloutit » et de ces ténèbres ressurgit l’espoir : « La fange se dissipe autre ronde enfantine Autre langage obscur merveilleuses comptines/Je parle du présent et songe l’avenir ». La poésie réussira-t-elle un jour à éloigner les ténèbres, on veut, en tout cas, y croire très fort.

« Noire est la vie de l’homme s’il condescend à vivre autrement que par rage aventureuse et LIBRE ». Choisir la liberté de la poésie, c’est déjà commencer à dissiper les ténèbres. écouter ce cri des tréfonds de l’être, c’est s’offrir un morceau d’éternité. « Dessinons notre ciel qui sera jaune veux-tu/Rose sera la mer ». Oui, unissons-nous pour redessiner notre monde à nous !

Par : Rosa Chaoui

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