Le destin de l’Afrique dans la pensée et l’action de Frantz Fanon et les évolutions africaines à la lumière de ses thèses et projections constituent le thème central d’un colloque international, dont les travaux ont débuté samedi à Alger.

Cette rencontre de trois jours se donne pour ambition de débattre des analyses de Frantz Fanon sur les évolutions africaines après plus d’un demi-siècle, a indiqué le directeur du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (C.N.R.P.A.H.), Slimane Hachi, à l’ouverture des travaux du colloque.

"Le constat souvent établi sur la base de ces analyses souligne le fait que nombre de pays africains sont loin d’avoir pris, de manière assurée, le chemin de la construction de sociétés susceptibles, à plus ou moins long terme, d’offrir à leurs peuples une économie génératrice de vraies richesses", a relevé M. Hachi.

Il a souligné, en outre, que la situation dans certains pays du continent africain renseignait "sur la persistance des effets traumatiques profonds occasionnés par la colonisation et réactivés parfois par des luttes intestines post-indépendance".

Les interrogations des psychiatres dans le prolongement des hypothèses fanoniennes sur les phénomènes d’aliénation, de décentrement culturel, de mimétisme semblent indiquer, selon les organisateurs, que ces questions "demeurent à l’ordre du jour".

En effet, de nombreuses études et travaux sur la situation actuelle des pays africains "s’évertuent à tenter de penser, souvent sur les traces de Fanon, le devenir du continent africain", a-t-on fait savoir.
"Il nous appartient, enfin, de capitaliser les écrits prémonitoires mais actuels que nous a laissés comme feuille de route Fanon", a estimé, de son côté, Olivier, le fils de Fanon.

Olivier Fanon a qualifié ces écrits de "palpables et si cohérents avec notre actualité et celle de pays qui nous entourent", citant, à l’occasion, "les scénarios prémonitoires envisagés" par son père qui semblent, selon lui, se reproduire aujourd’hui avec une cadence "infernale et régulière".
Le fils de Fanon s’est également interrogé si son père n’avait pas anticipé "sur ce qui semble se dessiner actuellement avec les formidables et soudaines prises d’intérêt de puissances étrangères pour l’Afrique".

En effet, a-t-il dit, l’Afrique "est" convoitée et elle "est un laboratoire à ciel ouvert pour toutes les agressions néocoloniales qui viennent inlassablement y expérimenter des projets, famine organisée, déplacement de populations, terrorisme et autres".

"Fanon est-il encore d’actualité, car en définitive, ces Africains ne sont toujours pas arrivés à rentrer dans l’histoire", a soutenu Olivier Fanon. Les travaux de ce colloque recoupent les axes de l’anthropologie fanonienne et l’Afrique, la diversité des situations et des luttes sociopolitiques ainsi que des expressions artistiques et littéraires dans l’Afrique d’aujourd’hui.

Les conditions de l’autonomie sociale et politique de l’Afrique : actualité de l’approche fanonienne figure, en outre, parmi les axes de cette rencontre. Plusieurs personnalités et chercheurs nationaux et internationaux intéressés par la pensée et l’action de Fanon prennent part à ce colloque qui verra l’annonce de la création de la fondation Fanon présidée par son fils Olivier.