Le Midi Libre - Culture - Kundera Entre le doute et la foi
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Edition du 10 Mars 2012



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Kundera Entre le doute et la foi
10 Mars 2012

Dans son Insoutenable légèreté de l’être, Milan Kundera semble bâtir l’édifice de la critique sentimentale. Les thèmes évoqués et la façon avec laquelle il les aborde, donne l’impression qu’il confectionne une sorte d’analyse psychologique d’une manière fine, mais au gout coriace.

Sentiments, croyances, et illusions des personnages se mirent face aux mots d’un Kundera qui évoque le doute et la remise en question , nous donnant l’impression d’entendre un Reggiani chantant que Le doute parfois est plus solide que la foi, et si le doute avait raison.
Il évoque la légèreté de la vie, il tire à boulets rouges à la face du sentimentalisme, il exhume le hasard et lui inflige la stature royale, nous rappelle aussi que la nécessité dans la vie se heurte souvent au courant puissant du destin qui ressemble à une lettre têtue qui s’écrit muettement, épousant la mesure d’un temps qui n’attend pas, usinant des dates et des actes inattendus.
« L’homme, parce qu’il n’a qu’une seule vie, n’a aucune possibilité de vérifier l’hypothèse par l’expérience, de sorte qu’il ne saura jamais s’il a eu tort ou raison d’obéir à son sentiment », écrit-il. L’angoisse, l’attente & le précipice. Devons-nous attendre dans nos coins ? Des choses vont être faites si on attend ici ? Ou bien devons-nous être sa vérité, avancer et battre l’instant ?
Telles sont les questions qui se cachent derrière les lignes luisantes d’un Kundera qui semble crier le « Es mussein (Il le
faut !) » de Ludwig Van Beethoven, ce phrasé Allemand que l’auteur illustre pour en faire le symbole de la nécessité, de ce qui pèse, qui a de la valeur, par opposition à la légèreté qui frivole.
Eh puis, évoquant le brin de Ludwig entre ses lignes pures, Kundera tricote la stature philosophique du quatrième mouvement du dernier quatuor opus 135 de Beethoven.
C’est une invitation à être, un clin d’œil à l’anthologie et une façon de dire que rien ne nous arrive dans la vie hormis nous-mêmes. Ces thèmes qui font naître des idées désenchantées peuvent sembler très durs. Mais nous restons fascinés par la pertinence de l’analyse psychologique menée comme si l’auteur semblait analyser les sentiments, croyances, illusions de chacun des personnages au plus profond d‘eux-mêmes.
L’insoutenable légèreté de l’être ressemble beaucoup à une sorte de Madame Bovary du XXème siècle sur fond de printemps de Prague.
Bien que la critique du sentimentalisme puisse déboussoler, l’on tend à aimer les réflexions sur la légèreté et la pesanteur de nos vies, le rôle du hasard contre celui de la nécessité, ainsi que les métaphores de nos vies dont le destin est une lettre qui continue de s’écrire à mesure que le temps avance tout en s’assurant de la répétition et de la variation d’évènements inattendus.
Le thème de l’angoisse devant le temps séduit, tant il rappelle à tout un chacun la brièveté de l’instant : « L’homme, parce qu’il n’a qu’une seule vie, n’a aucune possibilité de vérifier l’hypothèse par l’expérience, de sorte qu’il ne saura jamais s’il a eu tort ou raison d’obéir à son sentiment ».
Enfin, ce roman qui laisse d’innombrables horizons d’interprétation est malgré tout un roman d’amour et d’infidélité qui nous raconte les riches vies de deux couples modernes et libres dans la Tchécoslovaquie des années 70.
Le roman est digne de pureté, il est aussi couronné par de magnifiques scènes artistiques, par des images aussi mélancoliques, puissantes et belles qu’une photographie teintée d’émotion. Je pense particulièrement à Sabina avec son chapeau melon, qui elle-même en admire les capacités.
« Muss es ein , es mussein » le motif qui devient le noyau du quatrième mouvement du dernier quatuor opus 135 de Beethoven .
Dembscher devait de l’argent à Beethoven, et le compositeur, éternellement sans le sou, vint les lui réclamer.
« Muss es sein ? (le
faut-il ?) », soupira Dembscher.
« Es muss sein ! (il le
faut !) », répliqua Ludwig vivement.


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