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Edition du 14 Janvier 2012



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Festivités de Yannayer
Plus qu’une tradition… une histoire identitaire
14 Janvier 2012

Dans pratiquement tous les foyers maghrébins, le premier jour de l’an berbère Yennayer est fêté joyeusement autour d’un bon plat préparé à l’occasion. Les enfants y trouvent ainsi une joie immense à déguster les sucreries tolérées en ce jour mais également à savourer les histoires racontées par leur grands-parents. Les mamans profitent aussi de cette occasion pour couper une mèche de cheveux à leurs enfants et leur mettre du henné tout en souhaitant à leur progéniture une vie paisible pleine de succès.

Reste que la question posée par les enfants est celle de connaître l’origine de ces traditions. De sursoit une rafale de questions s’abat sur les adultes comme : que veut dire Yennayer ? D’où est venue son origine ? Est-il propre aux pays du Maghreb ?
Ce qu’il faudrait d’abord retenir et inculquer aux enfants, c’est que Yennayer est le premier jour de l’an du calendrier agraire qui est utilisé depuis l’antiquité par nos ancêtres. Ce calendrier est utilisé à travers tout le Nord africain, ce qui démontre l’immensité de Tamazgha.
Selon plusieurs sites dédiés à cette fête nous apprenons queYennayer correspond en réalité au premier jour de janvier du calendrier julien, qui aujourd’hui est décalé de 13 jours par rapport au calendrier grégorien, soit le 14 janvier de chaque année. Mais en Algérie les avis sont que la date de Yennayer est le 12 janvier suite probablement à une erreur des premières associations culturelles qui ont prôné le retour à cette fête traditionnelle, menacée de disparition.
D’où vient son origine ? Est-elle religieuse à l’instar des autres calendriers ou non ?
Vers 1968, l’académie berbère a proposé de créer une "ère berbère" tout comme il y a une ère chrétienne et une islamique, et a fixé comme an zéro du calendrier berbère les premières manifestations connues de la civilisation berbère, au temps de l’Égypte ancienne, lorsque le roi numide Chechonq Ier (Cacnaq) fondateur de la 22e dynastie égyptienne devint pharaon en Égypte. Avant d’envahir la Palestine, il réunifia l’Égypte en l’an 950 avant J.-C. À Jérusalem, il s’empara de l’or et des trésors du temple de Salomon (un grand évènement cité dans la Bible). Le nom de Yennayer provient du nom latin du mois, «ianuarius ou januarius», lui même nommé en l’honneur de Janus (mythologie), dieu romain des portes et des ouvertures.
Le premier yennayer suivant la naissance d’un garçon était d’une grande importance. Le père ou la mère maintenant effectue la première coupe de cheveux au nouveau-né et marque l’événement par l’achat d’une tête de bœuf. Ce rite augure que l’enfant sera le futur responsable du village. Il est répété lors de la première sortie du garçon au marché. Il est transposé, dans les mêmes conditions, à la fête musulmane chiite de l’achoura, dans certaines localités berbérophones.
«Amenzu n’yennayer » détermine la fin des labours et marque le milieu du cycle humide. Les aliments utilisés durant ce mois sont les mêmes que ceux de la période des labours. La nourriture prise est une bouillie, cuite à la vapeur ou levée. Les aliments augmentant de volume à la cuisson sont de bon augure. La récolte présagée sera d’une grande quantité. Les différentes sortes de couscous, de crêpes, de bouillies, etc., et les légumes secs les agrémentant apparaissent. Les desserts servis seront les fruits secs (figues sèches, abricots secs, noix, etc.), de la récolte passée, amassés dans de grandes et grosses cruches en terre pourvues d’un nombril servant à retirer le contenu (ikufan).
Le mois de yennayer est marqué par le retour sur terre des morts porteurs de la force de fécondité. Durant la fête, les femmes ne doivent pas porter de ceinture, symbole de fécondité. Celles transgressant la règle subiraient le sortilège de la stérilité. «Imensi n’yennayer» nécessite des préparatifs préalables. Dans les Aurès et en Kabylie, la veille, la maison est méticuleusement nettoyée et embaumée à l’aide de diverses herbes et branches d’arbres (pin, etc.). Elle ne le sera plus, durant les trois jours suivants sinon le balai de bruyère, confectionné pour la circonstance par les femmes lors de leur sortie à la rencontre du printemps (amagar n’tefsut), blesserait les âmes errantes. On procède au changement des pierres du «kanun» (inyen n’lkanun).
Tous les gestes accomplis pendant la fête se font avec générosité et abondance. Les participants à la célebration, espèrent recevoir, par leurs actions, la bénédiction des forces invisibles circonscrivant leur univers de croyance.
Les masques symbolisent le retour des invisibles sur terre. Au cours du mois de yennayer, les enfants se déguisent (chacun confectionne son propre masque) et parcourent les ruelles du village. Passant de maison en maison, ils quémandaient des beignets «sfendj» ou des feuilletés de semoule cuits «lemsemmen» que les gens s’obligent à donner. Par ce geste d’offrande les familles tissent, avec les forces invisibles, un contrat d’alliance qui place la nouvelle année sous d’heureux auspices.
Ce rite, comme celui de la première coupe de cheveux du nouveau-né, est transposé à l’achoura et repris lors de la période des labours. Le paysan distribuait d’humbles offrandes aux passants croisés sur son chemin et dépose de petites quantités de nourritures dans des lieux saints, en se rendant dans ses champs. «Amenzu’n yennayer» marque toutes les régions berbérophones par des jeux liés aux morts de retour sur terre : carnaval de Tlemcen, jeux de taâisit (os) des femmes de Ghadamès,...
La célébration de Yennayer s’articule autour de plusieurs symboliques. C’est un moment de convivialité familiale, une occasion de se souhaiter des vœux de prospérité, et elle marque le changement de saison (cette saison correspond à l’approche de la rupture des provisions gardées pour l’hiver).
Assagwas Amegas.

Par : Kahina Hammoudi

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