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Edition du 10 Décembre 2025



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Arrêter de fumer
Quel est le mécanisme de la dépendance au tabac ?
10 Décembre 2025

La dépendance au tabac est principalement liée à la nicotine, la substance que l’on retrouve en grande quantité, à plus de 93% dans la feuille de tabac.

La nicotine va agir au niveau de certains circuits nerveux dans le cerveau, en les modifiant et en activant la production d’une hormone que l’on appelle la « dopamine ». La dopamine, entre autres, participe au « circuit de la récompense » et provoque une sensation de plaisir. A force d’activer ce phénomène en consommant du tabac, le fumeur va s’habituer à cet état et la sensibilité du circuit nerveux du plaisir va s’atténuer, ce qui explique qu’il faudra de plus en plus de nicotine pour obtenir le même plaisir. Ainsi entre chaque cigarette, la concentration en nicotine diminue dans le cerveau qui va fabriquer de nouveaux récepteurs et donc provoquer un syndrome de manque… qui incite à griller une nouvelle cigarette. La dépendance est d’autant plus forte que la personne a commencé à fumer jeune, et en particulier pendant l’adolescence où se construisent les principaux circuits neuronaux dans le cerveau.

Quels sont les signes qui apparaissent en cas de manque ?
La dépendance au tabac est à l’origine de modifications du comportement sur le plan physique, psychologique et comportemental. Lorsque le manque en nicotine se fait sentir, les premiers signes qui apparaissent sont une envie irrépressible de fumer associée à une irritabilité et une nervosité. Une sensation de mal-être global persistera pendant quelques semaines, de même qu’une tendance à l’insomnie et un léger sentiment dépressif. Une sensation de faim et de besoin de sucre pourra s’installer. Chez certaines personnes, ce manque se traduira par un syndrome anxieux (stress, suées, angoisses). Généralement ces signes persistent quelques mois après le début du sevrage et s’estompent progressivement.

Comment le corps va réagir à l’arrêt du tabac ?
Au bout d’un certain délai, le corps commencera petit à petit à reprendre son fonctionnement normal. Tout d’abord, le métabolisme va ralentir car la nicotine a la particularité d’avoir une activité stimulante sur le corps. Le signe le plus flagrant est la sensation de fatigue intense qui survient les premières semaines du sevrage. Le tube digestif est également touché par ce ralentissement avec pour conséquence une constipation. Au niveau pulmonaire, les bronches vont reprendre leurs droits et évacuer un maximum de glaires enrichies en particules de fumée. En effet, les cils tapissant la paroi des bronches et de la trachée vont se remettre à fonctionner de façon coordonnée vers la bouche à nouveau après une période de paralysie ou de désorganisation. Il est par conséquent tout à fait normal de tousser les premières semaines. Autre réaction du corps, le goût et l’odorat se développeront dès les premiers jours d’arrêt. Il n’est pas rare d’avoir l’impression de redécouvrir le parfum d’objets du quotidien et de trouver certaines odeurs fortes alors qu’elles ne le sont pas. Auparavant saturées de fumée de cigarette, les bandes olfactives du nez se libèrent et doivent réapprendre à fonctionner normalement. Une fois l’odorat libéré, c’est au goût de faire son apparition. Les aliments deviennent plus savoureux, augmentant ainsi l’appétit et la sensation de faim. D’ailleurs il n’est pas rare de prendre du poids après l’arrêt de la cigarette, car celle-ci a un effet coupe-faim.

Quelles substances contient une cigarette ?
Une cigarette contient plus de 4.000 substances chimiques plus ou moins toxiques qui vont se mélanger à la fumée. Parmi ces substances, on trouve des solvants, des détergents, des hydrocarbures, des goudrons et même des traces de poison. Le mercure et le plomb sont des métaux considérés comme nocifs et cancérigènes. L’ammoniac, l’acétone sont utilisés normalement comme agents nettoyants. Les goudrons et le monoxyde de carbone sont retrouvés ailleurs dans les gaz d’échappements de voitures. Le toluidine, l’arsenic, le polonium 210, le pyrène, la naphtylamine ou le benzopyrène sont des composés chimiques mortels apparentés pour certains à du poison. Enfin l’acide cyanhydrique est comme son nom l’indique du cyanure, un poison utilisé notamment dans les chambres à gaz du régime nazi.
Un cocktail nocif, irritant, asphyxiant et cancérigène concentré dans seulement 8 centimètres.

Quels sont les dangers
de la cigarette ?
Les dangers de la cigarette pour le corps sont multiples et sont identifiés scientifiquement dans plusieurs dizaines de milliers d’études à travers le monde. Le premier danger est celui de faire une maladie cardiovasculaire comme l’infarctus du myocarde, la fameuse crise cardiaque. Fumer multiplie le risque de maladies cardiovasculaires par 3 ou 5 par rapport à une personne non fumeur. Le deuxième danger est d’origine respiratoire et pulmonaire. De nombreuses maladies des poumons trouvent leur origine principalement dans l’inhalation des fumées de cigarette. Le cancer du poumon qui est associé à un fort taux de mortalité, la broncho-pneumopathie chronique obstructive qui encombre les bronches et empêche de respirer correctement ou encore l’emphysème qui va détruire progressivement la structure alvéolaire des poumons. Différents types de cancers sont susceptibles de se développer à cause du tabac comme les cancers de la gorge, de la bouche, de l’œsophage, de la vessie, ou encore des reins.
Pour les hommes, la consommation de cigarettes augmente le risque d’être impuissant. Après 60 ans, la dysfonction érectile est deux fois plus fréquente chez les fumeurs.
Pour les femmes, fumer augmente le risque de cancer du col de l’utérus et pendant la grossesse, fumer expose le fœtus à des malformations physiques, un retard mental et à un risque de mort prématurée.

Comment savoir si c’est le bon moment pour arrêter ?
Il n’y a pas de règle pour déterminer le meilleur moment pour arrêter de fumer. Cet acte dépend de la sensibilité de chacun et surtout du niveau de motivation.
Néanmoins, il est plus facile de commencer à se sevrer lorsque l’on est bien entouré avec les encouragements de la famille et des amis. Si une ou plusieurs autres personnes sont décidées à réaliser ce défi ensemble, les chances de réussir sont majorées. Pour savoir s’il on est réellement prêt à arrêter, il faut se poser les bonnes questions : quelles sont les raisons réelles de mon envie d’arrêter ? Quels bénéfices personnels vais-je en tirer ? Ai-je suffisamment confiance en moi pour réussir ?
Si des doutes apparaissent sur la motivation à arrêter de fumer.

Quels sont les moyens à disposition pour arrêter de fumer ?
Il existe plusieurs approches et moyens pour commencer son sevrage tabagique. Premièrement, il faut déterminer si l’on est capable de le faire seul ou accompagné par un tabacologue. Plus de 90 % des fumeurs réussissent à arrêter sans l’aide d’une aide extérieure et comme la plupart des substituts nicotiniques sont en vente libre chez le pharmacien, il n’y a pas besoin de prescription médicale. Néanmoins, l’aide d’un tabacologue peut être précieuse si le niveau de dépendance est très élevé. Deuxièmement, il faut déterminer si un substitut nicotinique est nécessaire et si oui quelle est la forme la plus adaptée. Gommes à mâcher, comprimés à sucer, patchs, ou inhalateurs, il y a l’embarras du choix. Pour ceux dont la dépendance est importante, le médecin pourra prescrire un traitement médicamenteux comme le bupropion ou la varénicline qui vont directement agir sur le circuit de la récompense. Enfin, des techniques alternatives existent comme l’acupuncture, ou l’hypnose.

Quel est le dosage optimal pour les substituts nicotiniques ?
Pour choisir la bonne posologie pour son substitut nicotinique, il faut déterminer la quantité de nicotine ingérée par jour. On considère qu’une cigarette comporte 1 mg de nicotine. Donc pour une consommation de 20 cigarettes par jour, il faudra au moins égaler, dans un premier temps, 20 mg de nicotine en substitut. Puis progressivement toutes les deux semaines, il faudra baisser de 5 mg le dosage de nicotine pour s’habituer et se sevrer progressivement. Néanmoins ce calcul ne sied pas forcément à tout le monde.
Il est nécessaire de prendre également en compte la façon dont la personne fume. Tirer à fond sur sa cigarette en inhalant la fumée expose à un plus grand risque de dépendance. Il faudra alors augmenter le dosage des substituts. La plupart du temps, les gens sont en sous-dosage et adaptent la quantité en fonction de leur ressenti. Irritabilité, nervosité et insomnies sont les signes les plus souvent retrouvés lors d’un sous-dosage. En cas de surdosage, les signes retrouvés sont une accélération du rythme cardiaque, des vertiges, des nausées et vomissements et un dégout du tabac.

Quelles sont les caractéristiques
des patchs ?
Le patch est un autocollant qui va diffuser sur 24 heures à travers la peau, une dose définie de nicotine. Classiquement il existe 3 dosages différents : 7mg, 14mg et 21mg. Généralement il faut commencer avec les dosages les plus élevés pour diminuer progressivement. Le patch se colle à heure fixe sur une surface de peau sèche et sans poils pour une meilleure adhérence. La nicotine sera diffusée de façon régulière tout au long de la journée et peut être combiné avec des gommes à mâcher si un besoin inopiné se fait ressentir. C’est un bon moyen pour les personnes qui n’ont pas besoin d’avoir quelque chose dans la bouche ou de reproduire le geste. Il n’est pas conseillé de fumer avec un patch ce qui aura pour effet un surdosage en nicotine, de même que retirer le patch pour fumer ne sert à rien car de la nicotine sera encore présente en sous cutané. Le principal effet secondaire est l’apparition de rougeurs ou de démangeaisons chez des personnes qui ne supporteraient pas l’agent collant. De plus, il faut bien s’assurer que le patch est bien en place et ne se décolle pas ce qui pourrait fausser la période de sevrage.

Quelles sont les caractéristiques des gommes et comprimés ?
Les gommes à mâcher et les comprimés à sucer contiennent entre 1 mg et 4 mg de nicotine.
Leur diffusion se fait principalement via les veines situées sous la langue. Que ce soit pour les gommes ou pour les comprimés, il faut au moins en consommer une dizaine par jour, puis adapter en fonction des besoins ressentis. L’avantage des prises par la bouche est la rapidité avec laquelle les envies irrépressibles sont calmées et la mastication qui occupe la bouche et les idées. Pour les comprimés, il n’y a pas de précaution particulière, il suffit de les laisser fondre lentement dans la bouche. Pour les gommes, il existe une technique particulière pour optimiser la prise de nicotine. Premièrement, il faut mâcher lentement pour éviter une libération trop rapide de la nicotine pouvant déclencher un hoquet et des maux d’estomac. A partir du moment où le goût apparaît (compter 10 mastications), il faut coincer la gomme entre la gencive et la joue en attendant que l’atténuation du goût. Dès lors, un nouveau cycle de mastication peut commencer. Une gomme doit se garder environ 30 minutes. Si jamais la dépendance au tabac est très forte, il est conseillé de combiner les gommes à un patch.

Quelles sont les caractéristiques des techniques alternatives ?
Plusieurs méthodes non médicamenteuses revendiquent de pouvoir faire arrêter la cigarette. Il peut s’agir d’approches psychologiques et comportementales réalisées par un professionnel de santé qui réalisera des exercices simples et engagera la discussion. Une autre méthode qui ait réellement fait ses preuves est l’hypnose. Après une seule séance, il est possible d’avoir des premiers résultats, sachant qu’une séance de soutien est parfois nécessaire. L’hypnose ne marche qu’avec des personnes réceptives et il est donc inutile d’insister en cas d’échec. Concernant les autres techniques alternatives, l’homéopathie et l’acupuncture, il n’existe pas de preuve formelle de leur efficacité.

Que faire lorsque l’on a envie
de craquer ?
Le meilleur moyen d’éviter de craquer est de concentrer son esprit sur autre chose : occuper ses mains avec un stylo, un élastique ou tout autre objet de substitution. Cet objet de substitution servira de rempart à chaque envie irrépressible. Certaines personnes préfèrent avoir quelque chose dans la bouche pour mimer l’acte du fumeur. D’autres en profitent pour faire du sport car se dépenser permet de penser à autre chose et surtout de continuer à stimuler le circuit de la récompense par la sécrétion d’endorphines.
Des exercices de méditation et de relaxation peuvent également être la solution.

Comment éviter la prise de poids à l’arrêt du tabac ?
Plusieurs facteurs peuvent expliquer la prise de poids lors de l’arrêt de la cigarette. Premièrement, la nicotine a tendance à diminuer la sécrétion d’insuline. En la supprimant, l’insuline va augmenter et contribuer au stockage des graisses. Deuxièmement, la nicotine a un effet coupe-faim. Il est, donc, parfois conseillé de suivre les conseils d’un nutritionniste ou d’une diététicienne. Néanmoins, il faut également faire attention à toutes les conduites de substitution qui vont apparaître en conséquence de l’arrêt de la cigarette. Mettre quelque chose à la bouche est souvent le premier reflexe pour palier à ce manque, notamment de la nourriture : gâteaux, sucettes, bonbons, il s’agit surtout d’aliments sucrés, qui vont reprendre le rôle de la nicotine dans le circuit de la récompense. Grignoter trop sans avoir forcément faim, c’est augmenter ses apports caloriques et par conséquent prendre des kilos indésirables.


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