L’historien français, Benjamin Stora, vient de plaider en faveur de la reprise du dialogue algero- français sur l ‘histoire commune, celle relative, bien évidemment, à la période coloniale . Pour l ‘historien français « le chantier mémoriel entre les deux pays, gelé depuis l’été 2024, devra bien se remettre en route ».
Stora fait allusion au travail de la « Commission mixte d’historiens » algéro-française qui a été créée en août 2022 par les présidents Tebboune et Macron pour travailler sur le passé commun de l’Algérie et de la France, notamment les archives et les mémoires liées à la période coloniale.
Composée de cinq historiens de chaque pays, elle est co-présidée par l’historien français Benjamin Stora et l’historien algérien Mohamed Lahcen Zeghidi. Le travail de la commission, s’est interrompu il y’a donc plus d’une année suite à la crise qui a secoué les relations entre Alger et Paris pour cause, rappelons-le, de la reconnaissance par le président français de la « marocanité » du Sahara occidental . Cette crise, inédite, perdure encore. Pour Stora «le chantier mémoriel engagé depuis plus de vingt ans doit se poursuivre pour remonter aux sources, celles de la guerre de conquête ».
Dans une contribution au journal La Croix, publiée hier mercredi, il a salué la libération de Boualem Sansal et espère celle du journaliste Christophe Gleizes, mais il reste sceptique sur la suite des événements. Car il admet que les liens entre la France et l’Algérie sont « minés depuis l’été 2024 par une crise d’une gravité sans précédent ».
« Une simple poignée de main entre les deux présidents, français et algérien, avec un nouveau voyage à Alger suffira-t-elle ? Il est à craindre, hélas, qu’un seul geste, ou un seul discours, ne pourra faire disparaître les malentendus, les soupçons d’ingérence, et ne saura calmer les mémoires blessées qui continuent de saigner de part et d’autre de la Méditerranée ».
Car , selon lui, « les rapports entre la France et l’Algérie sont extrêmement complexes. L’Algérie n’était pas une colonie comme les autres ». Il fait cas des multiples exactions commises par le colonialisme contre les populations algériennes « avec l’installation d’une grande colonie de peuplement, après une conquête dure et sanglante qui a duré plus de cinquante ans au XIXe siècle » ?
Comment accepter la perte d’un territoire longtemps considéré comme français ? En France il est vrai beaucoup de français qui se recrutent essentiellement dans les milieux de la droite traditionnelle et de l ‘extrême droite, qualifiés par certains observateurs de partisans de « l ‘Algérie française », n’admettent pas à ce jour la perte de l’Algérie et son accès à l ‘indépendance.
Ce d’autant que pour lui « la France a échafaudé une grande partie de son récit national en valorisant la période coloniale longtemps conçue comme une « mission civilisatrice ». La loi de février 2005 qui a trouvé des « aspects positifs » à la colonisation en est la parfaite illustration de cet état d’esprit qui « gangrène « la société française.
Du côté de l’Algérie, précise encore Stora, « un imaginaire s’est fabriqué autour de la séparation avec la France coloniale, qui valorise tous les récits de résistance à l’emprise française ».
C’est dire que pour Stora la situation est fort complexe. Et de s’interroger : Comment « éteindre » avec un seul acte un tel incendie mémoriel ? « on ne peut pas comprendre la fin d’une histoire si on ne connaît pas son début »ecrit –il encore.
« Pour continuer à avancer, il faut donc remonter aux origines : à savoir la guerre de conquête au XIX.