Lors du 7e Sommet de coopération et de partenariat entre l’Union africaine (UA) et l’Union européenne (UE), le ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, Ahmed Attaf, a exhorté mardi à une réorganisation profonde des priorités bilatérales en matière de paix et de sécurité.
Dans un contexte "international erratique d’une extrême complexité" qui frappe de plein fouet l’Afrique, Attaf a tiré la sonnette d’alarme sur la résurgence des changements anticonstitutionnels de gouvernements et l’aggravation du terrorisme, appelant à un sursaut collectif pour contrer ces menaces structurelles.
Prononçant son allocution au cœur des travaux du sommet co-présidé par le président angolais João Lourenço et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, Attaf a souligné que "l’Algérie appelle à une réorganisation des priorités du partenariat Afrique-Europe en matière de paix et de sécurité". Il a décrit un continent confronté à des défis qui "ne sont plus de simples retombées liées à des données passagères ou ponctuelles, mais une réalité qui s’étend et s’enracine". Parmi les signaux d’alerte les plus vifs : la recrudescence des coups d’État, qui bloquent toute perspective de retour à l’ordre constitutionnel, et le terrorisme, dont la région sahélo-saharienne est devenue "le foyer mondial ou l’épicentre international", semant "le désordre et le crime dans les pays africains, dans un silence international qu’on peine à comprendre".
Le ministre a également dénoncé la "prolifération du phénomène des interventions militaires étrangères en Afrique", un "facteur structurel" qui "complexifie et éternise les crises et compromet toute chance de les régler par des voies pacifiques". Il a fustigé le "repli du rôle diplomatique continental et le désintérêt international pour les priorités sécuritaires et politiques africaines, qui ne bénéficient plus de l’intérêt requis dans l’agenda du multilatéralisme". Ces éléments, a-t-il martelé, imposent une réaction immédiate, car les risques africains sont "transfrontaliers, transnationaux et transcontinentaux".
Pour y remédier, Attaf a esquissé quatre priorités claires et urgentes. La première : "Mettre un terme à la léthargie internationale à l’égard des questions de paix et de sécurité en Afrique", afin de briser l’inertie qui laisse le continent vulnérable. La deuxième : La réhabilitation du "rôle diplomatique africain" et la promotion du principe des "solutions africaines aux problèmes africains", l’UA ayant déjà démontré sa capacité à agir quand elle dispose de "marge de manœuvre et de soutien international nécessaire". Troisièmement, un "investissement effectif et efficace dans le développement", vu comme la "voie la mieux indiquée pour prévenir les crises et s’attaquer à leurs causes profondes", en tenant compte de leurs dimensions socio-économiques. Attaf a ici appelé à la concrétisation des promesses européennes, notamment via l’initiative Global Gateway, pour injecter des fonds concrets en Afrique.
Enfin, une priorité "éminemment structurelle" : Mettre fin à la "marginalisation de l’Afrique dans tous les centres décisionnels internationaux en matière sécuritaire et économique". Cette exclusion, a-t-il averti, est "l’un des principaux facteurs structurels qui entravent l’Afrique dans la concrétisation de ses aspirations et de ses objectifs consacrés dans l’Agenda continental 2063".
Ce plaidoyer, salué par des délégations africaines et européennes, intervient dans un sommet qui vise à relancer un partenariat bilatéral évalué à 300 milliards d’euros d’engagements sur 2021-2027. Avec sept coups d’État en Afrique depuis 2020 et une hausse de 20 % des attentats jihadistes au Sahel selon l’ONU, l’appel d’Attaf résonne comme un diagnostic lucide. L’Algérie, actrice clé de la stabilité sahélienne, y réaffirme sa vision panafricaine, prônant une coopération équitable où l’Europe passe de spectatrice à partenaire actif. Les débats se poursuivront mercredi sur l’économie verte et la migration, mais le message est clair : sans refondation sécuritaire, le continent risque l’implosion.