Dans un monde où les crises énergétiques, les tensions géopolitiques et les défis climatiques redessinent les priorités des nations, la visite officielle du président de la République algérienne, Abdelmadjid Tebboune, en Italie, du 22 au 24 juillet 2025, s’impose comme un moment clé pour les relations algéro-italiennes.
Accueilli avec les honneurs par le président italien Sergio Mattarella et la présidente du Conseil des ministres Giorgia Meloni, le chef d’État algérien, à la tête d’une délégation de haut niveau, a présidé la 5e session du Sommet intergouvernemental algéro-italien et le Forum d’affaires bilatéral.
Ces événements, marqués par la signature d’accords stratégiques et des discussions approfondies, traduisent une ambition commune : consolider un partenariat exemplaire ancré dans une histoire méditerranéenne partagée et tourné vers des défis contemporains. De l’énergie à l’agriculture durable, en passant par la sécurité régionale et le dialogue interreligieux, cette visite marque un tournant décisif pour une coopération appelée à redéfinir les équilibres régionaux.
Une cérémonie protocolaire empreinte de solennité
L’arrivée du président Tebboune à Rome, mardi soir, a été suivie d’une cérémonie d’accueil officielle au Palais du Quirinal, mercredi 23 juillet. Ce haut lieu de la présidence italienne, symbole de la République, a vibré au son des hymnes nationaux algérien et italien, interprétés sous un ciel romain éclatant. Un détachement de la Garde républicaine italienne a rendu les honneurs, conformément aux traditions protocolaires, soulignant l’importance accordée à cette visite. Le président Tebboune, accompagné d’une délégation ministérielle de haut rang, a salué les dignitaires italiens avant de poser pour une photo souvenir avec son homologue, Sergio Mattarella, scellant symboliquement l’amitié entre les deux nations.
Les entretiens bilatéraux, d’abord en tête-à-tête, puis élargis aux délégations des deux pays, ont permis d’aborder un large éventail de sujets. « Cette visite constitue un nouveau jalon dans l’édifice des relations exemplaires entre l’Algérie et l’Italie », a déclaré le président Tebboune lors d’une conférence de presse conjointe avec Giorgia Meloni. Les discussions ont couvert la coopération dans des secteurs stratégiques : énergie, infrastructures, agriculture durable, transports, industrie pharmaceutique, gestion des ressources en eau et recherche scientifique. Au-delà des enjeux bilatéraux, les deux chefs d’État ont échangé sur des questions régionales brûlantes, notamment la situation au Moyen-Orient, la crise au Sahel et la question du Sahara occidental.
Sur le plan géopolitique, le président Tebboune a réitéré l’engagement de l’Algérie en faveur d’une solution politique au Sahara occidental, conforme à la légalité internationale. « Nous avons réaffirmé notre soutien commun à l’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies pour parvenir à une solution juste, permettant au peuple sahraoui d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination », a-t-il affirmé. Concernant le Moyen-Orient, il a appelé la communauté internationale à « assumer sa responsabilité politique et morale » pour mettre fin aux violations des droits du peuple palestinien, avertissant que « la situation exige des efforts urgents pour éviter une escalade et l’instabilité régionale ». Ces positions, ancrées dans la diplomatie algérienne, ont trouvé un écho auprès des autorités italiennes, qui partagent une vision méditerranéenne axée sur le dialogue et la stabilité.
Le Sommet intergouvernemental : un pilier de la coopération
La 5e session du Sommet intergouvernemental algéro-italien, coprésidée par le président Tebboune et la présidente du Conseil des ministres Giorgia Meloni au palais Chigi, a été le point d’orgue de cette visite. Ce mécanisme, instauré pour structurer la coopération bilatérale, a permis de dresser un bilan des avancées réalisées depuis la dernière session et de poser les bases de nouveaux projets ambitieux. « Cette session concrétise des démarches pratiques reflétant une volonté politique ancrée de renforcer nos relations historiques », a souligné le président Tebboune.
L’énergie, pilier central du partenariat algéro-italien, a occupé une place prépondérante. L’Italie, qui ambitionne de devenir un hub énergétique pour l’Europe, s’appuie sur l’Algérie, l’un de ses principaux fournisseurs de gaz naturel. En 2024, environ 20 % du gaz consommé en Italie provenait d’Algérie via le gazoduc Transmed, une part appelée à croître avec les nouveaux accords signés lors de cette visite. Le projet « Enrico Mattei », du nom de l’ancien président d’ENI, incarne cette collaboration étroite. Ce programme vise à moderniser les infrastructures gazières, à optimiser les capacités d’exportation algériennes et à garantir un approvisionnement stable pour l’Italie, tout en renforçant la sécurité énergétique européenne face aux incertitudes géopolitiques.
Mais la coopération énergétique ne se limite pas aux hydrocarbures. Les deux pays ont mis l’accent sur les énergies renouvelables, un secteur où l’Algérie cherche à diversifier son économie. Des projets de fermes solaires dans le désert algérien, soutenus par des investissements italiens, ont été discutés, avec un focus particulier sur l’hydrogène vert. « L’Algérie dispose d’un potentiel solaire exceptionnel et avec l’expertise italienne nous pouvons co-construire une industrie énergétique durable », a déclaré un responsable du ministère italien de la Transition écologique. Ces initiatives s’inscrivent dans les objectifs de l’Algérie de produire 15 000 MW d’énergie renouvelable d’ici 2035, tout en répondant aux ambitions européennes de décarbonation.
Le Forum d’affaires : un catalyseur pour les investissements
Le Forum d’affaires algéro-italien, tenu mercredi après-midi sous la supervision du président Tebboune, a réuni des opérateurs économiques des deux pays pour explorer de nouvelles opportunités d’investissement. Les discussions ont couvert des secteurs variés : agriculture durable, infrastructures, transports, industrie pharmaceutique, technologies numériques et gestion des ressources en eau. Plusieurs accords ont été signés, notamment dans la production de médicaments génériques, où l’Italie apporte son savoir-faire technologique et dans le développement de corridors logistiques pour faciliter les échanges commerciaux à travers la Méditerranée.
« Les relations entre l’Algérie et l’Italie ne cessent de se renforcer », a affirmé Giorgia Meloni, saluant la « grande compétence » du président Tebboune. Elle a rappelé la solidarité historique entre les deux nations : « Tout comme l’Italie s’est tenue aux côtés de l’Algérie dans les moments difficiles, l’Algérie a toujours été aux côtés de l’Italie. » Ce forum a mis en lumière le potentiel de l’Algérie comme destination d’investissement, grâce à ses réformes économiques, notamment la nouvelle loi sur l’investissement de 2022, qui facilite l’accès des entreprises étrangères. Les opérateurs italiens, de leur côté, ont présenté des projets dans des domaines comme la construction d’infrastructures portuaires et ferroviaires, essentielles pour positionner l’Algérie comme un hub logistique méditerranéen.
L’agriculture durable a également été un point fort des discussions. L’Italie, avec son expertise en agro-industrie, pourrait soutenir l’Algérie dans le développement de cultures résistantes au climat aride, comme l’olivier et la vigne, tout en modernisant les systèmes d’irrigation. « Nous voyons un potentiel énorme pour des partenariats dans l’agriculture », a noté un représentant de la Confédération italienne des agriculteurs. « L’Algérie, avec ses vastes terres arables, peut devenir un acteur clé dans la sécurité alimentaire régionale. »
Une dimension géopolitique et humanitaire
Au-delà des enjeux économiques, la visite a permis d’aborder des questions géopolitiques cruciales. Le président Tebboune a réaffirmé l’engagement de l’Algérie dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, plaidant pour des efforts collectifs visant à garantir la sécurité et le développement dans cette région. « Nous avons échangé sur les mécanismes de renforcement des efforts collectifs pour lutter contre le terrorisme », a-t-il déclaré, soulignant l’importance d’une approche régionale coordonnée. La question palestinienne a également été au cœur des discussions. Le président Tebboune a appelé à une action internationale pour mettre fin aux « violations continues » des droits du peuple palestinien, avertissant que l’instabilité au Moyen-Orient pourrait avoir des répercussions globales.
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Cette positlllion reflète la constance de la diplomatie algérienne, qui place la justice et la solidarité au centre de son action internationale.
L’Italie, en tant que membre de l’Union européenne, a exprimé son soutien à une solution négociée, renforçant l’alignement des deux pays sur les questions de paix et de stabilité.
La visite au Vatican, prévue jeudi 24 juillet, où le président Tebboune rencontrera le Pape Léon XIV, ajoute une dimension humanitaire et spirituelle à cette visite. Cette audience, rare pour un chef d’État algérien, témoigne de l’importance accordée par l’Algérie au dialogue interreligieux et à la promotion de la paix. Le Vatican, acteur influent dans la diplomatie mondiale, pourrait amplifier les messages de l’Algérie sur des questions comme la justice sociale et la coexistence pacifique.
Un partenariat ancré dans l’histoire
Les relations algéro-italiennes ne datent pas d’aujourd’hui. Dès les années 1950, l’Italie a soutenu la lutte pour l’indépendance algérienne, un geste qui a forgé des liens indéfectibles.
L’accord gazier de 1977, qui a permis la construction du gazoduc Transmed, a marqué le début d’une coopération énergétique stratégique. Depuis, les deux pays ont multiplié les partenariats, de la pétrochimie à l’industrie automobile, en passant par la formation professionnelle et la recherche scientifique.
Sous la présidence de Tebboune, cette relation s’est intensifiée. Depuis 2019, plusieurs projets d’envergure ont vu le jour, notamment dans le secteur énergétique avec ENI et Sonatrach et dans l’industrie avec des partenariats comme celui entre Fiat et des entreprises algériennes pour la production de véhicules. Ces initiatives s’inscrivent dans la vision de l’Algérie de diversifier son économie, longtemps dépendante des hydrocarbures, et de l’Italie de sécuriser son approvisionnement énergétique tout en diversifiant ses partenaires commerciaux.
Perspectives pour l’avenir
La visite du président Tebboune en Italie ouvre de nouvelles perspectives pour un partenariat qualifié d’« exemplaire » par les deux parties.
Les accords signés lors du sommet intergouvernemental et du Forum d’affaires, combinés aux discussions stratégiques, positionnent l’Algérie et l’Italie comme des acteurs clés dans la région méditerranéenne.
« Cette visite reflète la profondeur des relations historiques et des liens d’amitié enracinés entre nos deux pays », a conclu le président Tebboune.
À l’heure où l’Europe cherche à réduire sa dépendance énergétique vis-à-vis de certaines régions instables, l’Algérie se positionne comme un partenaire fiable. De son côté, l’Italie, avec son expertise technologique et son influence au sein de l’Union européenne, offre à l’Algérie des opportunités pour moderniser son économie et renforcer son attractivité. Ce partenariat, ancré dans la complémentarité, pourrait redéfinir les équilibres régionaux, tout en contribuant à la stabilité et à la prospérité en Méditerranée.
En conclusion, la visite officielle du président Tebboune en Italie, marquée par des engagements concrets et une vision commune et consacre l’Algérie et l’Italie comme des partenaires stratégiques dans un monde en mutation. De l’énergie à la diplomatie, en passant par l’économie et la culture, cette alliance méditerranéenne s’annonce comme un modèle de coopération pour les années à venir.