Blocage des réseaux sociaux et des applications de messagerie installées, perturbation d’Internet, déploiement de forces de police et de gendarmerie, installation de cellules de veille au niveau des cours de justice…
Les épreuves du Bac 2022, qui ont commencé hier 12 juin en Algérie, se déroulent sous haute surveillance sécuritaire. Plus de 700.000 candidats ont commencé dimanche les examens du Bac, ce précieux diplôme qui ouvre les portes des études supérieures aux lauréats Depuis quelques années, cet examen se déroule dans un contexte de tensions sur fond d’inquiétudes d’une fraude massive qui entacherait davantage l’image et la réputation du Bac algérien, dont la valeur ne cesse de décliner en raison de la détérioration de la qualité de l’enseignement dans les écoles et les lycées du pays. Mais les autorités ne semblent avoir qu’une seule obsession: empêcher par tous les moyens la fraude.
Internet de nouveau perturbé en Algérie
Pour la sixième année consécutive, l’Algérie est privée d’Internet pour cause de Bac. Les épreuves de l’examen de fin du cycle secondaire ont démarré ce dimanche 12 juin et les principaux services de messagerie et les réseaux sociaux étaient inaccessibles dès la matinée. La promesse de ne pas bloquer la connexion cette année n’a pas été tenue. Même la connexion filaire a été perturbée. La mesure a été prise pour éviter la triche. L’avènement d’Internet et des réseaux sociaux fait craindre aux autorités une fraude massive et une fuite des sujets à grande échelle.
Depuis quelques années, l’obsession de lutter contre la triche a pris le dessus sur le reste, bien que les épisodes de grande fuite des sujets ne soient pas très fréquents. Le plus mémorable est celui de 1992. À l’époque, ni Internet ni la téléphonie mobile et ses terminaux n’existaient pas encore mais l’examen a dû être refait à cause de l’ampleur de la fraude. D’où les critiques qui ciblent les mesures actuelles de blocage de la connexion. Le scénario de 1992 est la preuve que les méthodes "classiques" de triche peuvent être aussi, sinon plus, dévastatrices que ce que permettent aujourd’hui les nouvelles technologies. De plus, des techniques existent pour limiter les velléités de fraude, ou même les annihiler, comme l’interdiction des terminaux dans les salles d’examen et le brouillage du réseau dans les environs le temps que durent les épreuves. Mais c’est, semble-t-il, le "risque zéro" qui est recherché, un objectif pas évident à atteindre ni dans les examens scolaires ni dans d’autres domaines. L’Algérie a aussi durci sa législation en la matière. Un amendement du code pénal effectué en 2020 prévoit des peines de prison allant jusqu’à 10 ans pour toute tentative de fraude ou de fuite des sujets, et jusqu’à 15 ans si la fuite cause l’annulation partielle ou totale de l’examen.
Les réseaux sociaux et les messageries inaccessibles
Pour cette année, si l’Internet n’est pas fortement perturbé comme cela été le cas en 2021, les réseaux sociaux sont inaccessibles depuis le début des examens. Les messageries instantanées comme WhatsApp, Messenger, signal et autres sont également en panne. L’objectif est d’empêcher les fraudeurs d’utiliser les réseaux sociaux et les messageries pour diffuser les sujets ou envoyer des réponses aux candidats via les applications de messagerie instantanées. En visite le 6 juin à Touggourt, le ministre de l’Éducation nationale Abdelhakim Belabed a assuré qu’il n’y aurait pas de coupure d’Internet durant la semaine du Bac en Algérie. "Personne n’a évoqué la coupure de l’Internet", a-t-il dit.
Dispositif de surveillance renforcée
Cette année, en plus du dispositif sécuritaire
et technologique déployé pour surveiller les centres d’examen et couper les réseaux sociaux, le gouvernement a ajouté une couche supplémentaire pour muscler la lutte contre la fraude. Le 2 juin, le ministère de la Justice a demandé aux procureurs généraux d’installer au niveau de chaque cour de justice une cellule de veille et de suivi. Au niveau de chaque wilaya, la cellule est présidée par le procureur général et compte comme membres le directeur de l’Éducation, le chef de sûreté de wilaya, le commandant du groupement de gendarmerie, le chef du service territorial de la sécurité intérieure et "tous ceux qui ont un rapport avec la question". La composante de cellule renseigne sur le traitement sécuritaire de la fraude au Bac en Algérie et la volonté des autorités de lutter contre ce phénomène qui a pris de l’ampleur ces dernières années, avec l’avènement de l’internet et des réseaux sociaux.
Pour un candidat, il suffit de disposer d’un smartphone pour pouvoir communiquer avec l’extérieur et recevoir les réponses aux sujets du Bac. "Les membres de cette cellule ont tous le pouvoirs et compétences pour prendre des mesures contre les fraudeurs", a déclaré le ministre à la chaîne 3 de la Radio algérienne, ce dimanche. En avril 2020, le code pénal a été amendé pour durcir les sanctions contre les fraudeurs aux BEM et au Bac. Ces derniers risquent jusqu’à 10 ans de prison ferme et des amendes pouvant atteindre un million de dinars.